Valentin Boullier

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La Californie renforce sa législation relative à la protection des communications électroniques #epicwin octobre 12, 2015

Le gouverneur de Californie, M. Jerry Brown, a signé le 8 octobre le California Electronic Communications Act (CEPA SB-178). Cette loi a notamment pour objectif d’empêcher les entités gouvernementales d’accéder aux communications électroniques sans mandat, citation à comparaître ou autorisation de mise sur écoute. La Californie, déjà précurseur dans la protection des communications électroniques, renforce donc son arsenal législatif en tirant les conséquences des révélations d’Edward Snowden. Cette loi avait par ailleurs le support de plusieurs associations de défense des droits des citoyens, comme l’EFF (Electronic Frountier Foundation, très active dans la protection des droits fondamentaux), et la renommée ACLU (American Civil Liberties Union).

Rédigée par les sénateurs Mark Leno et Joel Anderson, cette loi renforce considérablement les droits des citoyens, en imposant aux government entities (définie comme « un ministère, une agence ou une subdivision, ou un individu agissant au nom de l’Etat ou de l’une de ses subdivisions ») d’obtenir un mandat ou une autorisation de mise sur écoute afin de pouvoir obtenir la production ou l’accès aux communications électroniques d’un citoyen. La loi établit également une longue liste de définitions. Par exemple, elle établit qu’une communication électronique est « le transfert de signes, signaux, écrits, images, sons, données ou renseignements de toute nature, système ou partie de système, en tout ou partie par un fil, par radio, ou par système électromagnétique, électrique ou optique ». Cette définition est à rapprocher de la définition établie par l’article L.32 du Code des postes et communications électroniques français, qui dispose que : « on entend par communications électroniques les émissions, transmissions ou réception de signes, de signaux, d’écrits, d’images ou de sons, par voie électromagnétique ». 

Cette loi renforce donc considérablement les droit des citoyens. Ainsi, les entités gouvernementales peuvent accéder physiquement ou électroniquement aux appareils visés si et seulement si l’une ou plusieurs des conditions suivantes sont remplies :

  • obtention d’un mandat, dont les formes sont conformes aux autres dispositions de la loi;
  • obtention d’une autorisation de mise sur écoute;
  • consentement spécifique du détenteur de l’appareil;
  • consentement spécifique du propriétaire de l’appareil, si l’appareil a été perdu ou volé;
  • sans mandat, s’il existe un danger de mort ou de blessures graves;
  • si l’appareil est perdu, volé, et si les communications électroniques pourraient permettre d’identifier et de contacter le propriétaire de l’appareil.

Une dernière disposition s’applique aux saisies d’appareils électroniques dans les prisons.

De même, le mandat autorisant la production et l’accès aux communications électroniques doit respecter plusieurs conditions formelles :

  • il doit notamment indiquer les informations à saisir, la période de temps concernée, les comptes et/ou les applications concernées, et l’information recherchée. Ainsi, l’interception massive avec traitement a posteriori de l’information afin d’y déceler une information ou un renseignement jusque-là non spécifiquement recherché est prohibée;
  • le mandat doit impérativement préciser que si une information différente de celle recherchée est obtenue, celle-ci doit être « scellée » et ne pas être utilisée, sans une autorisation judiciaire. Nous retrouvons là la notion de « probable cause », chère au droit américain. En effet, si une juridiction estime qu’il existe une « probable cause », elle peut alors délivrer une autorisation pour qu’une telle information puisse être utilisée;
  • l’authenticité des informations doit également être garantie par le fournisseur de service;
  • la juridiction en charge de l’affaire pourra également, à titre discrétionnaire, imposer la destruction des informations saisies mais ne rentrant pas dans le champ d’application du mandat;
  • enfin, et il s’agit là d’un point intéressant, si le fournisseur de service délivre des informations de manière volontaire (et ne violant pas d’autres dispositions juridiques) ces informations devront être détruites 90 jours après leur saisie. Des exceptions sont une nouvelle fois prévues, par exemple si l’entité gouvernementale obtient le consentement de l’expéditeur ou du destinataire sur l’information délivrée. L’emploi d’une telle conjonction de coordination n’est pas neutre. Il en sera de même, si la juridiction délivre une autorisation de rétention. Cependant, cette autorisation est elle-même soumise à plusieurs conditions, par exemple s’il existe une raison de penser que l’information constitue la preuve qu’un crime a été commis.

Une dernière disposition importante est la possibilité pour un citoyen, partie à un procès ou à une procédure de réclamer la suppression des informations obtenues en violation du quatrième amendement, qui dispose que :

The right of the people to be secure in their persons, houses, papers, and effects, against unreasonable searches and seizures, shall not be violated, and no Warrants shall issue, but upon probable cause, supported by Oath or affirmation, and particularly describing the place to be searched, and the persons or things to be seized.

Cette loi constitue, de toute évidence, une avancée importante pour la protection des droits fondamentaux, et les principales associations de défense des droits ont salué sa signature par le gouverneur.

The law places California not only at the forefront of protecting digital privacy among states, it outpaces even the federal government, where such efforts have stalled

ZETTER (K.), « California now has the nation’s best digital privacy law », www.wired.com, publié le 8 octobre 2015, consulté le 12 octobre 2015, consultable ici.

Il estégalement intéressant de noter que de nombreux universitaires américains avaient adressé au gouverneur de l’Etat de Californie une lettre en faveur du SB-178. Cette lettre peut être librement consultée ici.

Pour aller plus loin :

  • Le dossier législatif peut être consulté ici.
  • HANS (G.S.), « A Major Win for Privacy: California ECPA Signed into Law », cdt.org, publié le 9 octobre 2015, consulté le 12 octobre 2015, consultable ici.
  • Anonyme, « California Rejects Warrantless Surveillance, Enacts CalECPA », epic.org, publié le 9 octobre 2015, consulté le 12 octobre 2015, consultable ici.
  • Anonyme, « California’s Electronic Communications Privacy Act (CalECPA) – SB 178 », www.eff.org, date de publication inconnue, consulté le 12 octobre 2015, consultable ici.