Depuis l’arrêt rendu par la Cour européenne de justice de l’Union européenne le 13 mai 2014, le droit à l’oubli est l’objet de nombreux articles et actualités. Les premiers « dé-référencements » ont été relevés récemment. Nous pouvons noter l’initiative du journal britannique « The Telegraph », qui a publié une liste d’articles dont les liens renvoyant vers le site web du journal n’apparaissent plus dans les résultats de recherche de Google. La liste est longue, et les articles concernent des personnes physiques, les personnes morales ne pouvant invoquer un quelconque droit à l’oubli (l’article peut être consulté ici). Fortement contesté, le droit à l’oubli est susceptible de porter atteinte à de nombreux droits et libertés fondamentaux, tout en en protégeant d’autres. La Cour note ainsi la nécessité d’établir un « juste équilibre » particulièrement difficile à délimiter.
La CJUE note ainsi que :
Au vu de la gravité potentielle de cette ingérence, force est de constater que celle-ci ne saurait être justifiée par le seul intérêt économique de l’exploitant d’un tel moteur dans ce traitement. Cependant, dans la mesure où la suppression de liens de la liste de résultats pourrait, en fonction de l’information en cause, avoir des répercussions sur l’intérêt légitime des internautes potentiellement intéressés à avoir accès à celle-ci, il y a lieu de rechercher, dans des situations telles que celles en cause au principal, un juste équilibre notamment entre cet intérêt et les droits fondamentaux de cette personne au titre des articles 7 et 8 de la Charte. Si, certes, les droits de la personne concernée protégés par ces articles prévalent également, en règle générale, sur ledit intérêt des internautes, cet équilibre peut toutefois dépendre, dans des cas particuliers, de la nature de l’information en question et de sa sensibilité pour la vie privée de la personne concernée ainsi que de l’intérêt du public à disposer de cette information, lequel peut varier, notamment, en fonction du rôle joué par cette personne dans la vie publique.
(§81)
En effet, dans la mesure où l’inclusion dans la liste de résultats, affichée à la suite d’une recherche effectuée à partir du nom d’une personne, d’une page web et des informations qui y sont contenues relatives à cette personne facilite sensiblement l’accessibilité de ces informations à tout internaute effectuant une recherche sur la personne concernée et peut jouer un rôle décisif pour la diffusion desdites informations, elle est susceptible de constituer une ingérence plus importante dans le droit fondamental au respect de la vie privée de la personne concernée que la publication par l’éditeur de cette page web.
(§83)
CJUE, grande chambre, 13 mai 2014, (Gooble Spain SL, Google Inc. c/ Agencia Española de Protección de Datos (AEPD), Mario Costeja González », disponible ici.
Pour aller plus loin :
- FOEGLE (J.-P.), « La CJUE, magicienne européenne du « droit à l’oubli » numérique « , in Revue des droits de l’homme/ ADL, 16 juin 2014, disponible ici.
- BOUTIER (F.), « Le droit à l’oubli : une menace pour l’e-reputation ? », pro.clubic.fr, publié le 25 septembre 2014, consulté le 26 janvier 2015, disponible ici.
- FLO (pseud.), « Droit à l’oubli, une page Wikipédia prise pour cible », www.gizmodo.fr, publié le 5 août 2014, consulté le 26 janvier 2015, disponible ici.
- Technology Team, « Telegraph stories affected by EU’ right to be forgotten », www.telegraph.co.uk, publié le 26 janvier 2015, consulté le 26 janvier 2015, disponible ici.